vendredi 28 décembre 2012

L'hélium, ce deuxième élément le plus abondant, est menacé de pénurie


Les réserves stratégiques américaines se vident, les prix mondiaux s’envolent. Gros acheteur, le CERN doit s’adapter...

Le parc Disneyland de Tokyo arrête de gonfler des baudruches depuis mardi ? Cela signifie que le monde se bat pour de l’hélium, indispensable aux postes à souder. Aux appareils d’imagerie médicale à résonance magnétique. 
Au CERN. «On fait face depuis cet été à de nouvelles tensions sur le marché», confirme Serge Claudet, responsable de l’exploitation cryogénique sur le LHC. «L’hélium, c’est un peu le sang de cet accélérateur de particules, et notre site dispose des plus grandes installations de re-liquéfaction et de stockage liquide au monde
Le deuxième élément le plus abondant de l’univers semble manquer. Les prix s’envolent. Aux Etats-Unis, les 1000 pieds cubes ont vu leur prix passer de 50 dollars au début de la dernière décennie à plus de 160 dollars, selon les dernières indications de l’USGS, le bureau de géologique américain. Cette situation est liée à la privatisation du secteur, aux Etats-Unis, un pays plus crucial pour les approvisionnements mondiaux d’hélium que l’Arabie saoudite pour ceux de pétrole. Aujourd’hui, les trois quarts de ce gaz y sont produits. Dont une moitié provenant de la Réserve fédérale d’hélium, constituée durant la Guerre froide. Dans le Bush Dome, formation rocheuse aux confins du Texas et du Kansas. Depuis 1996, Washington revend ces stocks stratégiques. Alerté sur les risques de dépendance future envers la Russie ou le Qatar, le Sénat pourrait cependant adopter, d’ici à la fin de l’année, une loi ralentissant le rythme de vente de ces réserves.
Les grands groupes privés – comme Air Liquide ou Praxair – n’ont guère pris le relais. Touché par une explosion meurtrière en 2004, le site algérien de Skikda – société cogérée par la Sonatrach et Linde, dont la commercialisation est réalisée d’Ecublens (VD) – devrait tourner à plein régime l’an prochain. Une autre est prête à démarrer dans le Wyoming. Avant le lancement d’une énorme ligne au Qatar, en 2014. «Ces sources additionnelles devraient satisfaire la demande mondiale durant cinq ans», relève l’USGS. 
Mais ensuite? S’il est principalement tiré du gaz naturel, l’hélium n’est pas présent dans les titanesques ressources de gaz de schiste mises au jour aux Etats-Unis. «Le plus gros obstacle à long terme n’est pas le manque d’hélium, ni sa demande galopante en Asie, mais le fait que les ressources ne sont pas laissées dans le sous-sol: elles en remontent, mélangées au gaz naturel, et sont ensuite brûlées dans l’atmosphère», poursuit William Nuttall, professeur d’énergie à l’Open University et coauteur d’un livre sur le Futur de l’hélium. Ce dernier milite pour la création d’une agence gérant des stocks internationaux.
Pour se protéger contre toute rupture d’approvisionnement – et lisser des prix d’achat qui ont «quasi doublé en une décennie» –, le CERN a mis en place des moyens de stockage stratégiques. «On a besoin de 150 tonnes d’hélium liquide pour faire fonctionner le LHC et les autres infrastructures cryogéniques, mais nous maintenons un tampon de sécurité qui nous conduit à racheter du gaz dès que nous passons sous les 165 tonnes», explique Serge Claudet. 
Autre protection, des contrats d’approvisionnement gelant le prix sur trois ans. «Notre taille – et notre ouverture statutaire au marché européen – nous permet de mettre en concurrence des fournisseurs différents», explique ce dernier. Ce n’est pas le cas de Disneyland à Tokyo .
SOURCE : LeTemps.ch

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