dimanche 29 janvier 2012

Peut-on annuler la dette des pays de l'Union Européenne ?






Renaud DOZOUL, 34 ans, est architecte de formation. Il crée une agence à Paris en 2004 après avoir exercé pendant deux ans à Mexico. Il se consacre désormais à la recherche économique à l’Institut Economique Molinari, et à l’écriture. Il publie notamment en 2011 « 10 bonnes raisons de restaurer la Monarchie » aux éditions Muller et travaille actuellement sur un ouvrage consacré aux fondements de la liberté en occident. 


« Annulons la dette du vieux monde. »

Comment se fait-il que personne n’ait eu avant lui l’idée pourtant simple qu’Emmanuel Todd a jetée dans la marre lors d’unentretien accordé par le démographe/anthropologue/historien/politologue au Point ? 

Mais oui enfin ! Nous mesurons chaque jour la profondeur de l’abîme dans laquelle nous plongent la dette publique et la gravité des menaces qui pèsent sur nos économies, sur notre épargne, sur notre monnaie ou sur notre travail. Si la dette est si dangereuse, annulons tout simplement la dette ! Et ce sera un bon pied de nez à tous les financiers cupides et autres agences de notations malintentionnées, qui sont responsables de nos malheurs, et manipulent nos hommes politiques et nos États comme des marionnettes ! 

On ne sait pas s’il faut en rire ou en pleurer.

Chaque ligne de l’entretien ubuesque du « prophète certifié »  mériterait une correction sévère, mais le plus grave est sans doute l’idée selon laquelle on pourrait faire « disparaître » la dette. Il faut vraiment nager dans la pensée magique pour ne pas concevoir qu’à chaque euro de dette correspond un euro d’épargne.

En annulant un euro de dette, on détruit donc mécaniquement un euro d’épargne. L’euro du petit épargnant français bien sûr, ou l’euro du fonds de pension américain.

Le vrai problème que pose la dette est moral, et il est double :

Tout d’abord, il ne faut pas oublier que contracter une dette puis décider unilatéralement de s’en défausser s’apparente tout simplement à du vol. L’échelle et la complexité de l’organisation des créances ne change rien à la nature du vol. Les créanciers lésés seraient ainsi en droit de saisir des tribunaux pour sanctionner le non-respect du contrat passé au moment de l’achat de la dette. La saisie de biens pure et simple étant difficilement envisageable, cela reviendrait en réalité à isoler le pays mauvais payeur de toutes les organisations internationales et à le marginaliser dans toutes les relations diplomatiques. Sur le plan plus pratique de l’émission d’obligations futures, les conséquences d’un défaut de paiement sont tout à fait prévisibles. Si vous prêtez mille euros à un ami et qu’il vous annonce au bout d’une semaine qu’il ne vous remboursera pas, il y a peu de chances que vous lui prêtiez à nouveau un centime. L’exemple de l’Argentine entre 1998 et 2002 offre une image tout à fait claire de ce qui attend un État qui n’honore pas ses dettes : L’impossibilité totale d’emprunter sur les marchés pendant des années.

Mais en amont de la gestion du défaut, se pose la question essentielle de la légitimité d’un État à endetter les contribuables, et plus encore les contribuables des générations futures !

La question ainsi posée, on peut légitimement se demander si l’on est tenu d’honorer des engagements pris par d’autres ! Le problème étant que les « autres » d’hier sont ceux qui veulent aujourd’hui se débarrasser des dettes accumulées sous le tapis en faisant peser la perte sur les contribuables et sur les épargnants. 

Ces deux point moraux rendent la solution très difficile : Il est immoral de faire peser l’inconscience des dirigeants politiques sur les contribuables, et il est également immoral de faire table rase de la dette pour que les dirigeants de demain puissent repartir de plus belle.

La réponse est simple : On ne dépense pas l’argent des autres (et encore moins à crédit). 

C’est donc seulement en limitant au maximum la taille et les prérogatives de l’État que nous pourrons espérer limiter les dégâts inhérents à son existence.

En attendant, on peut espérer que la fuite des créanciers impose un régime au pain sec à nos États, et que la démocratie pourra endiguer leur gourmandise fiscale.

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire

Les commentaires sont ouverts a tout le monde. La liberté d'expression est pleine et entière...
Merci, toutefois, de savoir respecter les commentaires des uns et des autres et de modérer vos propos. Cordialement votre.