lundi 30 janvier 2012

La percée du parti de ll’UKIP et de Nigel Farage en Grande Bretagne






Ronny Ktorza, diplômé de l'IEP d'Aix-en-Provence et d'HEC, est avocat depuis janvier 2011









Outre-manche, un parti « populiste » grapille, jour après jour, quelques points dans les sondages : le Parti pour l’indépendance du Royaume-Uni (UKIP).

Il se pourrait même que, prochainement, ce mouvement dépasse les Démocrates libéraux (Liberal Democrats) qui sont la troisième force politique du pays. Certes, il faut tenir compte de l’effondrement desdits Démocrates libéraux qui avaient longtemps surfé sur leur opposition à la guerre en Irak. Mais, justement, au vu de la probable recomposition du paysage politique britannique dans les années à venir, l’UKIP pourrait tirer son épingle du jeu.


Mais qu’est-ce que l’UKIP ? Comme son nom l’indique, il s’agit d’un parti eurosceptique, dont de nombreux membres sont des rescapés déçus du Parti Conservateur, lequel a trahi son pays, selon eux, en signant le Traité de Maastricht. Parmi ces transfuges, se trouve Nigel Farage, leader actuel du mouvement. Ce dernier fut d’ailleurs créé en 1993, soit juste après la signature dudit texte.

Farage – qui se décrit comme « libertarian » (terme difficilement traduisible en français puisqu’il englobe tous les libéraux, y compris les non-libertariens) – a développé l’UKIP de façon étonnante : ce parti a ainsi défait aux élections européennes le Parti travailliste et les Démocrates libéraux en 2009, preuve de la légitime lassitude ressentie par les citoyens britanniques à l’égard de l’Union européenne et de son fonctionnement.

Il faut dire que Nigel Farage, peu adepte de la langue des bois, n’hésite pas, depuis de longues années, à pointer du doigt, les dérapages des membres de la Commission et des parlementaires européens.

En effet, en 2004, la toute fraîche Commission Barroso intégrait un membre condamné pour financement illégal de parti, Jacques Barrot. Farage demanda alors sa démission. Le principal intéressé répondit que cette condamnation pénale était couverte par l’amnistie présidentielle et que personne ne pouvait la mentionner, conformément au droit français. Barrot serait-il frappé d’amnésie au point d’oublier que Farage était anglais ?



Quelques mois plus tard, Farage exigea que les membres de la Commission déclarent où ils passent leurs vacances. Sa requête fut rejetée sur le fondement du droit à la vie privée desdits membres. Il est toujours amusant de voir cette institution, si soucieuseen matière de transparence financière, se réfugier dans une telle opacité dès que ses membres sont concernés, au mépris de l’argent du contribuable, grâce auquel vivent ces bureaucrates. Cela n’empêcha pas Die Welt de publier le fait que Barroso avait passé une semaine sur le yacht du milliardaire grec, Spiro Latsis. Jusque-là, rien de choquant. Après tout, le président de la Commission est en droit d’avoir les amis qu’il souhaite, fût-ce de riches industriels. Mais quand on se souvient que, peu avant, la compagnie maritime de Latsis avait bénéficié d’une subvention de l’État grec, approuvée par la Commission européenne, le rapport de cause à effet devient alors plus limpide.

Insatiable, Farage ne s’arrêta pas en si bon chemin : en janvier 2007, Joseph Daul fut élu en tant que nouveau leader du groupe PPE (Parti Populaire Européen) au Parlement européen. L’UKIP rappela alors que Daul était sur le banc des accusés dans une affaire d’abus de biens sociaux relative au mode de financement du FNSEA (Fédération nationale des syndicats d’exploitants agricoles). Il ne fut blanchi qu’en décembre 2008 et cela n’empêcha pas la justice française de pointer les dérives de la FNSEA. Daul menaça Farage de poursuites mais, ne passa finalement pas des paroles aux actes.

Enfin, plus généralement, grand critique du projet européen, Farage stigmatise l’euro depuis 1999 : il rappelle qu’un tel projet monétaire ne peut fonctionner durablement puisque les économies des divers États de la zone euro sont structurellement différentes. Il prédisait dès sa création les difficultés que rencontreraient quatre États : la Grèce, l’Irlande, le Portugal et l’Espagne. Il ne s’est pas trompé. Dès lors, il n’est pas étonnant que l’UKIP grimpe petit à petit dans les sondages.


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