jeudi 16 février 2012

La sanction populaire grecque ne vient pas de la rue ...


Valentin Petkantchin détient un doctorat ès sciences économiques et est diplômé du Magistère média et formation économique de l’Université d’Aix-Marseille III. Il a été chercheur au Centre d’analyse économique et enseignant d’économie au sein de cette même université. Entre 2004 et 2006, il a été le directeur de la recherche de l’Institut économique de Montréal. Il est l’auteur d’un livre sur l’histoire de la pensée économique et l’œuvre d’Adam Smith, intitulé Les sentiments moraux font la richesse des nations. Il est actuellement chercheur à l’Institut économique Molinari et analyste à la société de gestion Overlord France Finance.
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Les protestations contre le dernier plan d’austérité grec et les affrontements dans la rue ont fait les manchettes en ce début de semaine, avec 150 magasins pillés, 48 bâtiments incendiés au centre d’Athènes et des centaines de personnes blessées et arrêtées. Pourtant, ce ne sont pas ces actes de violence, bien visibles, qui menacent le plus l’État grec –  sur le point d’obtenir une nouvelle aide de 130 milliards d’euros – mais la défiance fiscale et la méfiance de la population vis-à-vis du secteur bancaire qui se « développent en coulisse ».


D’une part, sans parler de « panique bancaire », la crainte du défaut de l’État grec et d’une sortie possible de l’euro ont poussé les particuliers et les entreprises à retirer leur argent des banques et à fuir le système financier grec, le fragilisant au passage davantage encore (voir Figure ci-dessous). 

Figure 1 : Evolution des dépôts dans le système financier grec, 2009-2011*



*données de fin d’année

Source : Banque de Grèce ; calculs de l’auteur.

Les dépôts du secteur privé (entreprises et ménages) auprès des organismes financiers ont ainsi baissé d’environ 17% en 2011 passant de 210 milliards d’euros à 174 milliards. La baisse représente plus d’un quart (-26,7%) par rapport à début de 2010, date à laquelle les problèmes de solvabilité de l’État grec ont commencé à inquiéter les investisseurs! Étant donné que les risques de défaut de la Grèce et de sortie de l’euro ne sont pas nuls, ce n’est pas tant cette fuite de capitaux qui surprend mais plutôt le fait que les banques détiennent  encore 174 milliards d’euros de dépôts. Car si ces risques se matérialisaient,  le pouvoir d’achat de ces économies risquerait de fondre comme neige au soleil, la nouvelle monnaie grecque perdant rapidement de sa valeur face aux autres devises telles que l’euro.  

Ensuite, la défiance de la population vis-à-vis du gouvernement se concrétisera sans doute lieu de plus en plus sur le terrain fiscal, et affectera toujours davantage les recettes que le gouvernement compte officiellement collecter.

À cet égard, il est intéressant de noter que les recettes provenant de la TVA ont accusé une baisse importante de près de 19% entre janvier 2011 et 2012. Les recettes fiscales totales sont en baisse de 7% sur un an alors que les autorités prévoyaient une augmentation de 8,9%. Sur le seul mois de janvier dernier,  il manque ainsi au gouvernement grec 1 milliards d’euros par rapport aux prévisions officielles, soit   1,1% des recettes budgétisés pour 2012.

Certes, la récession et le report notamment de versement de la TVA par certaines entreprises en difficultés, y ont contribué. Mais dans un pays où le « marché noir » est relativement important – estimé à environ 25% du PIB officiel – la multiplication des plans d’austérité pourrait lui donner une grande « bouffée d’air frais »et susciter une « révolte » fiscale susceptible de déjouer les plans des autorités grecques, européennes et internationales.

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